Soir de printemps,
A l'encens à moitié éteint,
J'en ajoute encore.
Buson Yosa (1716-1783)
Origines de l'encens
La légende raconte qu'au VIe siècle des pêcheurs d'Awaji vinrent ramasser sur la plage les débris issus d'une tempête. Ayant recueilli un long morceau de bois sombre, ils le jetèrent sur un bûcher d'où s'éleva aussitôt une senteur éblouissante. Les pêcheurs crièrent alors au prodige et allèrent faire présent de ce bois mystérieux à la maison impériale. Le prince fit trancher le bois en deux parties : l'une pour y sculpter une effigie du Bouddha et l'autre pour la déposer au Temple de la Loi Prospère. C'est ainsi que, selon la légende, le bois d'encens aurait été introduit au Japon et s'y serait répandu jusque dans ses usages les plus élevés...
Le mot encens vient du Latin incensus, "causer une passion (une émotion), devenir éveillé". Son utilisation remonte en fait aux temps biblique, et a son origine en Egypte où des gommes et résines aromatiques d'arbres furent importées d'Arabie et des côtes de Somalie pour être utilisées durant des cérémonies religieuses. L'encens fut également utilisé par les pharaons pour combattre les odeurs déplaisantes, chasser les démons et louer la présence des Dieux. Cette utilisation religieuse se répandit ensuite à Babylone, en Israel, en Grèce et à Rome, puis jusqu'en Inde où il est encore aujourd'hui largement utilisé, autant par les Hindous que par les boudhistes.
Importé au Japon au VIe siècle par les moines bouddhistes et utilisé durant les cérémonies de purification, les délicates senteurs du Kô (l'encens japonais de haute qualité) devinrent, 200 ans plus tard, des objets de raffinement et de plaisir auprès des nobles de la Cour Impériale de l'Ere Heian. Durant le Shogunat au XIVe siècle, les guerriers samouraïs parfumaient leurs casques et armures avec de l'encens afin de se conférer une aura d'invincibilité avant de rencontrer leur ennemi et faire face à leur destin. Mais c'est à l'ère Muromachi au XVe et XVIe siècle que l'art raffiné de l'encens se développa et se répandit dans les classes hautes et moyennes de la société japonaise.
Fabrication
Les fabricants d'encens japonais perpétuent jusqu'à nos jours le savoir-faire d'un spécialiste des encens, nommé Koju, qui au 16e siècle exerçait ses talents à la cour impériale. Les entreprises importantes de fabrication de l'encens au Japon continuent d'élaborer leurs produits principalement "à la main" comme cela se fait depuis des centaines d'années. Des ingrédients de base de très grande qualité sont utilisés pour la fabrication d'encens raffinés tels que l'aloès (Jinkô) ou le santal.
Durant le processus de fabrication, les gommes naturelles et les résines de bois précieux ainsi que des extraits de fleurs sont mis en cuve où ils sont mélangés avec d'autres matières premières. C'est dans cette phase de l'élaboration de l'encens que résident la plupart des secrets de fabrication.
La pate ainsi obtenue est alors modelée en longue tiges d'encens (sans bâtonnet), en cônes ou bien encore en tortillons. Après quoi ceux-ci sont découpés et disposés sur des formes en bois pour sécher. Les encens sont ensuite placés dans un local dont l'hygrométrie et la température sont ingénieusement contrôlés par des ouvertures et des volets en bois qui dispensent l'exacte quantité d'air et de lumière nécessaire à leur durcissement.
Kôdô ou la voie de l'encens
Autour de l'encens et de ses rituels s'est ainsi développée une véritable culture. Cette "voie de l'encens", appelée "Kôdô" en japonais, n'est pas seulement associée au plaisir de l'odorat, mais à une expérience esthétique et à une spiritualité en accord avec l'esprit du Zen. Pratiqué seul ou en groupe, les rituels associés à l'encens permettent d'atteindre, au sein de ce monde moderne en perpetuelle effervescence, un état de paix intérieure favorisant la réflexion et la méditation.
Les pratiquants modernes de cette "art de vivre" utilisent l'encens pour rendre plus raffinée l'ambiance de leur intérieur ou de leur bureau, pour honorer un invité, pour célébrer des évènements spéciaux ou plus simplement pour relaxer et dé-stresser le corps et l'esprit après une journée fatiguante.
Dans le boudhisme Zen, l'encens est d'ailleurs considéré comme un des cadeaux les plus précieux que l'on puisse offrir...
Nous remercions la "Boutique Zen", spécialiste de l'encens japonais, pour ces informations.
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A lire :
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La Voie de l'Encens
De Louise Boudonnat et Harumi Kushizaki
Editions Philippe Picquier
"Si le sablier donne à l'esprit une image du temps qui s'enfuit et coule entre les doigts, les volutes de fumée s'échappant d'un bâton d'encens le rendent à la fluidité d'une durée déployée sans hâte dans l'espace. Le temps du sablier est une course, une course contre le temps. Celui de l'encens est une danse qui prend son temps. Son art est la lenteur, mais une lenteur aérienne, et le parfum de l'encens, pénétrant les sens, suscite images, rêves et souvenirs..."
Un livre essentiel pour comprendre l'encens replacé dans son histoire. Ses rapports avec le bouddhisme et la culture japonaise en générale. Vous y découvrirez les matières qui le compose mais aussi les rites et les jeux qu'il a engendré.
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Carré d'encens Japonais: "Poème"
"Fresque poétique, ode à la jeunesse et à la joie: Rose de mai, Tubéreuse, Poire-cannelle, Thé vert, bambous verts."
Non, il ne s'agit plus de livre, mais bien d'encens !!! Eh oui, Amazon.fr a ouvert rayon "Cuisine et Maison" qui, entre autres produits, offre une large gamme d'encens japonais. Avis aux amateurs !
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MU - Calligraphie de Taisen Deshimaru
(reproduite sur ce site avec l'aimable autorisation de la Boutique Zen www.boutiquezen.com)
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Les 10 vertues de l'encens
Ouvre l'esprit à la spiritualité
Purifie le corps et l'esprit
Libère l'esprit trop occupé
Développe l'esprit d'éveil
Compagnon dans la solitude
Apporte la paix dans l'agitation
En abondance on ne s'en lasse pas
En petite quantité on s'en satisfait
Le temps n'altère en rien ses qualités
S'utilise quotidiennement sans risque
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